vendredi 22 janvier 2010

Championnat national de boxe professionnelle : Un K.O et trois arrêts de l’arbitre lors des finales



La clôture du premier championnat national de boxe professionnelle a eu lieu le 26 décembre dernier au Camp de l’Unité à Yaoundé, sur les six combats au menu, seul deux sont allés au terme des rounds prévus. Mais en dehors des questions d’organisation et d’arbitrage qui se posent encore, les boxeurs camerounais, pourtant talentueux, restent abandonnés à eux-mêmes.
Le championnat national de boxe professionnelle, qu’a lancé en trois journées l’association Sportive Espoir Promotion (ASSESPRO), le 19 septembre 2009 à Yaoundé, s’est achevé le samedi 26 décembre dernier au Camp de l’Unité avec six finales qui n’ont malheureusement pas attirées grand monde. Comme d’ailleurs à chaque événement sportif dans notre pays ces derniers temps. Après le combat de levée de rideaux entre deux pupilles, combat soldé par un match nul controversé, le premier combat de la soirée, chez les 69 kg, prévu en six rounds n’a pas duré 30 secondes, Patrice Sanda de l’Adamaoua dit « Le Turbo » est tombé sous les masses de cailloux balancées par Mbanga Etienne du Sud. Masse de cailloux comme on l’appelle vulgairement n’en revenait pas lui-même, en voyant son adversaire tituber de coups comme un homme en état d’ivresse. C’est par l’arrêt de l’arbitre que le danger a été évité. Pour la presse, telles que les choses étaient entamées, la soirée ne devait pas être longue. Au cours du deuxième combat avec les 60 kg, le coach de Fouda Achille du Sud a vite jeté l’éponge à la fin du premier round, voyant que son poulain a reçu un nombre incalculable de coups de poings de la part du remuant Serge Mbarga, alias « Le Tigre » de la région du Centre.
Le troisième combat chez les 63,5 kg, s’est joué sur un K.O imprévisible. Le Lion Fogué Judicaël du Sud fonce dès le premier coup de gongs sur sa proie Ndoumo Fouda François du Centre, alias « Le Français », alors qu’il mène au jeu dans ce premier round, il lâche sa garde par trop de suffisance. Erreur, Le Français ne réfléchit pas et lui lâche un boulet en plein front, Le Lion s’effondre sans bouger. Le soigneur panique, on croit qu’il vient d’avaler sa langue, il essaie de revenir au centre du ring en vacillant, mais l’arbitre refuse d’autoriser une tuerie et arrête le massacre, le K.O est consommé. Deux autres combats vont suivre et iront jusqu’à huit rounds, mais c’est ici que l’on va constater les limites et l’incompétence du juge arbitre nommé Sa Majesté Ondoua Mbida, qui est allé diriger les combats étant en état d’ébriété avancé, lors du combat des 58 kg, entre Bekono Georges et Abdoulaye Hassane, tous du Centre. Le combat opposant les 75 kg, Ngathe Ignace et Endougou Tobie du Centre aura été sans doute le plus animé sur le plan technique, il opposait la puissance de Tobie à la résistance d’Ignace dit « La Machine », mais à la fin Ngathé avait la face gâtée par les frappes du solide et admirable Tobie.

La sortie spectaculaire de Bolo
Bolo c’est le boxeur du Centre qui s’appelle en réalité « Tchenga Ambomo, il est celui qui draine toujours avec lui un véritable fan club bien organisé et en ébullition. Il chauffe la salle quand sa star arrive, les adhérents arborent des tee shirts portant son sobriquet, ils savent danser et appuyer leur héros durant le combat. C’est un exemple de ce qui devrait se faire pour tous les pugilistes, mais sans moyens, sans idées, il est difficile de faire comme Bolo. Dans ce dernier combat de la soirée, Bolo affrontait Atangana dans les 81 kg, pour dix rounds. Les deux premiers rounds sont sans commentaires, quelques spectateurs disent de Bolo qu’il n’est pas aussi puissant qu’on le croyait. Mais dès le 3e round, Bolo ne permet pas à Atango de respirer, il fonce et colle sur son vis à vis avec des poings fermés, Atangana est cerné et coincé comme un rat palmiste aux filets, assommé par une machine à coups, l’arbitre ivre qui est revenu sur le ring après des contestations arrête cette décharge électrique de Bolo. Le fan club enflamme le Camp, « Bolo tue-le !, tue-le ! On va faire les comptes à l’hôpital ». Rien à faire à l’annonce de sa victoire, Bolo est porté en triomphe, le ring est assailli par des supporters et des badauds aux anges. Bolo a su se faire un petit monde là où règnent la misère et l’indigence des boxeurs.

Le calvaire des boxeurs camerounais
Sur ce plan tout est à refaire dans l’ensemble de notre mouvement sportif, les heures de lancement des manifestations ne sont jamais respectées, les pugilistes sont mal habillés, les arbitres sont saouls, le peu d’équipements disponibles est partagé entre les différents boxeurs en compétitions. On ne connaît pas le nombre d’équipes affiliées, la boxe féminine est marginalisée et les filles sont débordées par les pressions et le harcèlement des hommes du milieu. A la fin des compétitions, les boxeurs ne reçoivent aucune prime, en dehors de quelques modiques mises des parieurs, se montant entre 1000 et 5000 francs CFA. Certains boxeurs sont obligés de quitter le Camp de l’Unité à pied pour rejoindre leur domicile au milieu de la nuit, il n’y a pas d’éléments de récupération après les combats ou les entraînements. Un vrai calvaire. Tous les vainqueurs de la saison portaient la même ceinture qui faisait le tour de la salle avant de revenir chez le SG de la fédération, du vrai cinéma à la limite. Les boxeurs vaincus ne rentrent qu’avec leurs bosses et blessures, où les dirigeants leur demandent d’aller appliquer des glaçons et rien de plus à la maison. Les vainqueurs ne se contentent du port de la ceinture que le temps d’un tour d’honneur dans la salle. Par ailleurs les décisions arbitrales sont contestées à tout moment, on parle des stages de recyclage qui n’existent pas depuis des lustres pour expliquer cette insuffisance. Sur le plan sanitaire, pas de secouristes, pas d’assurance. Il y a juste un aide-soignant sans boîte à pharmacie qui passe le temps à prier pour qu’il n’y ait pas d’accident grave, on dirait une vraie course vers la mort. Dans son mot aux boxeurs à l’ouverture de la soirée, en tant que représentant du président de la fédération camerounaise de boxe, le Secrétaire général Nwaha Boniface, a supplié les mécènes pour venir soutenir le Noble art en décrépitude, il rappellera pour confirmer la mascarade et l’échec dans l’organisation de cette discipline, que les boxeurs camerounais sont souvent obligés de s’évader sous d’autres cieux et signer la nationalité de ces pays, pour survivre.
La salle même qui accueille les compétitions n’a rien à voir avec la classe du Cameroun sur le plan mondial, le Camp de l’Unité qui n’est qu’une vieille scierie coloniale adaptée en salle de sport est toujours le même, c’est ce hangar qui a servi de cadre d’entraînements à Joseph Bessala, Grand Joe qui a remporté la médaille d’argent aux Jeux olympiques du Mexique en 1968, à Martin Ndongo Ebanga, médaillé de bronze de Los Angeles aux USA en 1984, ou à d’autres comme Ngatchou Louis, Jean Marie Emebe, Ekassi Norbert, Essissima Emmanuel et plus récemment le jeune prodige Hassan Ndam Ndjikam qui fait des émules en France. On ne peut plus compter tous les jeunes qui ont fui le Cameroun à cause de ces conditions de travail suicidaires, citons : Riban Césaire, Anaba Thomas, Kaldjob et bien d’autres. Sans compter ceux qui sont restés sur place et qui n’ont pas pu résister à l’alcool pour noyer leurs soucis, c’est le cas du champion d’Afrique Georges Akono dit Cobra, dont la carrière s’est abîmée dans le vin, à cause d’un sport sans avenir au Cameroun.

Tableau des résultats
69 kg, Mbanga Etienne du Sud« Masse de Cailloux » bat par arrêt de l’arbitre au premier round Patrice Sanda « Le Turbo » de l’Adamaoua
60 kg, Mbarga Serge du centre « Le Tigre » bat Fouda Achille du Sud par arrêt de l’arbitre au premier round
63,5 kg, Ndoumo Fouda François du Centre « Le Français »bat par K.O Fogué Judicaël du Sud « Le Lion »
58 kg, Bekono Georges du Centre »Kounta Kinté est battu aux points par Abdoulaye Hassane du Centre
75 kg, Ngathé Ignace du Centre « La Machine » est traumatisé aux points par Endougou Tobie du Centre
81 kg, Tchenga Ambomo du Centre « Bolo » tabasse Atangana du Centre par arrêt de l’arbitre.

Jean Charles Jérémie

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